Ayaandaran [Malchance]

 

 

Ayaandaran [Malchance]

de

Dr Abdillahi Sh. Houssein dit « Hantiwadaag »

 

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Mots-clés: somali, Somalie, écriture littéraire; roman social — mère célibataire; amour, famille; mariage.

Contexte: Le roman Ayaandaran [Malchance] de Dr. Abdillahi Sh. Houssein dit « Hantiwadaag » a été publié à Mogadiscio (Somalie) en 1980. Le roman paraît d’abord dans Taxanaha xiddigta1 sous forme de feuilleton, chaque chapitre formant une unité. Comme de nombreux romans de cette époque, Ayaandaran dit relater une histoire vraie.

Descriptif: Ayaandaran, a 174 pages reparties en 7 chapitres. Le titre signifie littéralement « malchance ». Le roman porte sur les malheurs vécus par l’héroïne Asli. La page de couverture, qui représente une jeune femme enceinte et pleurant, fonctionne comme une annonce créant une attente précise auprès du lecteur.

Le roman est focalisé sur le parcours de vie de l’héroïne Asli, une jeune collégienne de bonne famille de 16 ans, joyeuse et appréciée de tous, à qui ses parents ont inculqué une éducation stricte et qui fut entrainée un soir dans une aventure d’une nuit par sa camarade Anab. Asli tombe gravement malade et découvre sa grossesse. Rejetée par sa famille, par ses amis et par Adawé — l’homme marié qui l’a mise enceinte, elle est l’objet d’opprobre. Seule et démunie, elle est recueillie par Fatouma, une infirmière dont elle a fait la connaissance à l’hôpital où elle a été admise et qui deviendra pour elle une seconde mère. Celle-ci la garde chez elle jusqu’à son accouchement et ensuite elle lui loue une chambre.

Après la naissance de son fils, Mohamed, Asli décide de reprendre sa vie en main. Suivant les conseils de son frère Ali Amur, avec qui elle a gardé contact, et de Fatouma, elle termine le secondaire et passe un concours d’élève-instituteurs qu’elle réussit.

Désormais indépendante financièrement, elle aspire à fonder une famille et à devenir une épouse respectée. Belle jeune femme, de nombreux hommes la courtisent, mais son passé la poursuit. Certains la jugent « fille-facile » parce qu’elle est mère célibataire, d’autres critiquent ses parents qui rejettent leur fille, seule avec un enfant. Asli repousse ceux-ci de même que d’autres, cette-fois-ci, en raison de leur comportement, tel que la consommation d’alcool ou la jalousie.

Marquée par ces histoires malheureuses, Asli se replie sur elle-même, exclut les hommes de son existence et se résigne à mener une vie de mère-célibataire.

Après avoir réussi le concours d’entrée à l’université Lafoole2, elle retrouve un ancien prétendant dont les parents l’avaient rejetée. Il l’aime toujours d’un amour sincère. Lorsqu’ils ont terminé leurs études, il persuade ses parents qu’Asli est une honnête fille; ces derniers finissent par s’engager à convaincre les parents de la jeune femme de l’accepter. Les jeunes gens heureux se marient enfin, entourés de leurs proches.

Ayaandaran illustre l’intransigeance de la morale sociale qui conduit Asli au dur apprentissage des règles définies par une société prompte à juger et à condamner, épreuve que la jeune femme surmonte. D’après le roman, cette société très conservatrice est appelée à évoluer et à se montrer plus tolérante.

Référence: W.Q. Cabdullahi Sh. Xuseen « Hantiwadaag », Ayaandaran (Qiso dhab ah). [s.l. s.d. — Mogadiscio, 1980]. Taxanaha xiddiqta 3. — [W. Q. Abdullahi Sh. Houssein « Hantiwadaag [Socialisme] », Malchance (Histoire vraie). [s.l. s.d. — Mogadiscio, 1980].Taxanaha xiddiqta3] 3]. 174 pages.

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Notes:

1   Etoile d’octobre, le quotidien de Mogadiscio, fondé après le coup d’Etat du 15 octobre 1969 de Siyad Barré.

2   À Afgooya, à une vingtaine de kilomètres de Mogadiscio.

3   Feuilleton dans Etoile d’octobre, quotidien de Mogadiscio (voir note 1).

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Extrait du roman (pp.14-15)

Traduction de Fatouma Mahamoud

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« Asliyeey, jirrooyinka sidaad u og tahay waa la kala leeyahay. Sidaa darteed maanta iyo wixii ka dembeeya waxaa laguu wareejiyey Jiinokoloojiya, waa qeybta haweenka ». Markii ereygaas uu takhtarkii ka soo baxay, Asli waxaa u sugnaaday in uur ku soo baxay. Qarracan iyo naxdin darteed baa hadalkii ka soo bixi waayey, waxaana indhaheeda ka soo booday ilmo xoog leh oo qoysay garbasaarteedii.

Le médecin: « Asli, comme tu le sais certainement, il existe différentes sortes de maladies. Pour cette raison, à compter d’aujourd’hui et pour les jours qui vont suivre, tu seras transférée en gynécologie, c’est la partie qui soigne les maladies de femme ». En entendant ces paroles, Asli s’effondre de chagrin et d’amertume, elle ne peut pas répondre au médecin, seules ses larmes se répandent et inondent son châle.

Takhtarkii intuu u soo dhawaaday Asli oo ilmadii suuf uga tiray buu ku yiri:« Asli…is deji… wax kastoo qofka ku dhacaaya, waa wax minallaahi ka yimid, waana in loo samraa, waxba ma aha, sow ma taqaanid ninka iska leh cunugga saddexda bilood ku dhow oo aad uurkiisa leedahay ? »

Le médecin se rapproche d’elle, essuie ses larmes et lui dit:« Asli… calme-toi… tout ce qui arrive à l’être humain est dû à la volonté de Dieu. Ce n’est pas bien grave, il faut se montrer patient. Tu connais, bien entendu, le père de l’enfant de trois mois que tu portes ? »

Asli wax jawaab ahi ka ma bixin ee oohintii bay kordhisay. Muddo nusa saac ah baa takhtarkii hadba hadal samirsiin iyo dejin ah u soo jeediyey, Asli erey qur ah baa ka soo baxay oo ah: doktoore ha u sheegin waalidkey iyo dadkoo dhan in aan uur leeyahay !

Asli ne répond pas, mais les larmes coulent de plus belle sur son visage. Le médecin tente de la calmer pendant une demi-heure en lui disant des paroles réconfortantes et en l’exhortant à la patience. Dans un soupir, Asli enjoint le médecin de ne donner cette information ni à ses parents ni à toute autre personne !

« Takhaatiirta waa ka xaaraan inay sirta dhibaan », buu ugu jawaabay takhtar Jumcaale, wuxuuna u yeeray kalkaaliyihii isagoo faray in Asli uu geeyo qaybta cudurrada haweenka.

« Il est strictement interdit aux médecins de divulguer des informations concernant leurs patients », lui répond le docteur Jimaleh, ensuite il appelle son assistant et lui ordonne de transférer Asli au département gynécologique. 

Haweenkii ku jiray qaybta daawada markii ay maqleen in Asli la wareejiyey bay iska fahmeen in ay uur leedahay, waxaana muddo yar kadib  cusbitaalkii gees ka gees laga ogaaday in Asli cunug aan aabbe lahayn siddo.

Les autres patientes en médecine générale apprennent qu’Asli est transférée en gynécologie et en déduisent dès cet instant qu’elle est enceinte. Peu de temps après, d’un coin à l’autre de l’hôpital, tout le monde sait qu’Asli porte un enfant de père inconnu.

Fatouma Mahamoud