Chanson

Le mot vient du latin cantiōnem, accusatif de cantio (1) « chant, chanson », attesté chez Plaute ; (2) « incantation, enchantement, charme », attesté chez Caton l’Ancien et chez Cicéron. Cantio est lui-même un dérivé de canō « chanter » ;*kan- est une racine indo-européenne, qui a donné, entre autres, le nom de la poule (hen) en anglais.

Jusqu’à la fin du xiiie siècle, poésie et musique formaient un tout indissociable dans la littérature française. C’était l’époque de la chanson de geste (épique) et de la chanson des troubadours (lyrique). Au même moment, on avait également, parallèlement à ces compositions savantes, des chansons populaires composées de couplets en vers assez brefs, entrecoupés d’un refrain.

Depuis le milieu du xixe siècle, des poètes ont baptisé « chansons » des textes en vers courts, de longueur variable, formulés dans une langue relativement simple. On a ainsi, entre autres,

Chansons des rues et des bois (Victor Hugo)

Chanson d’automne (Poèmes saturniens, Paul Verlaine)

La chanson du mal-aimé (Alcools, Apollinaire)

Chanson d’automne (Corona benignitatis anni, Paul Claudel)

Si ces chansons de poètes sont généralement dépourvues de refrains, on trouve quand même des cas où l’écrivain s’est plié à cette contrainte. Par exemple, dans « Les chants du crépuscule » de Victor Hugo, on trouve un texte intitulé « Autre chanson » (p. 286), qui comporte le refrain suivant :

Ô ma charmante,

Écoute ici

L’amant qui chante

Et pleure aussi.

Actuellement, en Occident, l’appellation de « chanson » est appliquée principalement à la « chanson de variété ». Elle comporte un texte en versets assez courts, rimés, mis en musique et interprété par un chanteur ou une chanteuse. Les couplets sont entrecoupés d’un refrain généralement reproduit à l’identique du début à la fin. On note parfois, comme dans la « Chanson pour l’Auvergnat » de Georges Brassens, que le refrain subit une légère variation d’une répétition à l’autre.

Dans le cadre des littératures en langues africaines, nous proposons de réserver le nom de « chanson » aux créations présentant les caractéristiques suivantes :

texte en versets courts, rimés ou non, disposés en strophes entrecoupées d’un refrain fixe ou variant légèrement, destiné à être chanté a cappella ou avec un accompagnement instru­mental plus ou moins développé ;

le chanteur ou la chanteuse peuvent aussi être accompagnés d’un chœur plus ou moins fourni ;

les compositeurs de ces textes sont clairement identifiables, à la différence des auteurs de chants rituels, des chants intervenant dans les contes, des chants de travail, des berceuses, etc.  ;

il n’y a pas nécessairement identité entre celui ou celle qui exécute la chanson et celui ou celle qui l’a composée, contrairement aux chants des griots ;

thématiquement, elle ne connaît guère de limitations ;

la chanson n’est pas liée à un contexte spécifique de performance (à la différence des chants rituels, des chants intervenant dans les contes, des chants de travail, des berceuses, etc.).

La chanson (paroles et musique) est généralement protégée par copyright. Elle est exécutée en concert (public ou privé), dans un contexte récréatif, et diffusée par tous les médias modernes (disque compact, DVD, Internet, radio, télévision). Dans les médias audiovisuels, elle est souvent mise en scène dans un clip vidéo qui lui assure une audience supplémentaire. Tout un chacun peut l’exécuter dans un cadre privé.

La chanson n’est donc qu’un type spécifique de chant.

Henry Tourneux

Bibliographie

GAFFIOT Félix, 2000, Dictionnaire latin-français, nouvelle édition revue et augmentée sous la direction de Pierre Flobert, Paris, Hachette.

HUGO Victor, 1984, Poésies, Volume 1 « Les Feuilles d’automne » ; « Les chants du crépuscule », Paris, Imprimerie nationale.

REY Alain (dir.), 2001, Le Grand Robert de la langue française, Paris, Dictionnaires Le Robert.

Van GORP et al., 2001, Dictionnaire des termes littéraires, Paris, Honoré Champion.