tummude / la calebasse

 

Mots-clés

peul, fulfulde de l’Aadamaawa (Cameroun et États voisins) — oralité, conte, chantefable, taalol

Production du corpus

Conteuse:  Djebba, 45 ans. Née à Kaya, elle ne parle que le fulfulde. Elle a appris à conter auprès de sa grand-mère et de sa mère. Elle perfectionne ses contes en contant auprès de ses enfants et petits-enfants.

Contexte de production

Hodandé [Hoɗannde ] (Dargala, Cameroun, région de l’Extrême Nord), 06/03/2011. Enregistré dans une case en matinée, suite à un rendez-vous  pris avec la conteuse.

Descriptif

Un homme plante un pied de calebasse (Cucurbitacée) dans son champ. Chaque fois un enfant en arrache un bout avec les ongles. Il veut voir si la calebasse est mûre. Un jour la calebasse poursuit l’enfant. Une chanson rythme leur course : fajiri teltel, asiri teltel, dumbiri dumbaa. Ils rencontrent un porc-épic qui pile du mil. Une musique rythme le pilage du mil : caŋcaŋgari caŋgal caali. Le Porc-épic demande à l’enfant ce qui se passe. L’enfant dit que la calebasse le poursuit. Le Porc-épic garde l’enfant dans sa chambre. La calebasse demande à récupérer l’enfant. Une bagarre se déclenche entre le porc-épic et la calebasse. Un éléphant arrive et demande ce qui se passe. L’Éléphant écrase la calebasse. L’enfant veut s’enfuir, les morceaux de calebasse lui collent au corps. Il se débarrasse des morceaux de calebasse.

Collecte et édition

Collecté sous la direction de: Hadidja Konaï

Image et son: Henry Tourneux

Transcription et traduction: Boubakary Abdoulaye et Henry Tourneux

Annotation: Henry Tourneux

 

 

 

 

Yoo, tummude aawaande. Bon ! Une calebasse semée.
Mhm ! Mhm !
Gorko aawi tummude haa ngesa. Un homme a semé un plant de calebasse dans un champ.
Na’am ! Na’am !
Yoo! E ɓinngel ɗon yaala fuƴa tummude goo Bon ! Et un enfant en passant presse la calebasse entre le pouce et l’index.
Mhm ! Mhm !
ɓenndi na ɓenndaay. Elle est mûre ou elle n’est pas mûre ?
Mhm ! Mhm !
Fuƴa, yaala fuƴa, Il la presse entre le pouce et l’index, il passe et la presse,
yaalta fuƴa, il repasse et la presse.
saaloo. Il poursuit son chemin !
Suy, nyalde feere, ɓinngel tummude, Puis, un beau jour, la petite calebasse,
o fuƴi, tummude tokkake mo. il l’a pressée, et la calebasse l’a suivi.
Mhm! Mhm!
Yoo ! Bon !
Dummbiri dummba[1] ! Dummbiri dummba !
Fajiri tel tel ! Le matin tel tel !
Asiri tel tel ! Le soir tel tel !
Dummbiri dummba. Dummbiri dummba.
Ɗum ɗon doggida. [La calebasse] le poursuit.
Mhm ! Mhm !
Fajiri tel tel ! Le matin tel tel !
Dummbi… dummbiri dummba ! Dummbi… dummbiri dummba,
Fajiri tel tel ! Le matin tel tel !
Asiri tel tel ! Le soir tel tel !
Dummbiri dummba. Dummbiri dummba.
Tummude ɗon dogga, La calebasse court,
o ɗon dogga. [L’enfant] court.
Mhm ! Mhm !
O yehi o tawi saŋalde ɗon sotta gawri ; En route il trouve un porc-épic en train de décortiquer du mil en le pilant dans de l’eau.
Mhm ! Mhm !
chant Caŋcaŋ giɗi cangaŋ caali, chant Caŋcaŋ giɗi cangaŋ caali[2],
caŋcaŋ giɗi cangaŋ caali,
caŋcaŋ giɗi.
(Rires) (Rires)
« – Too, e ɗume waɗi ? « – Bon, et que se passe-t-il ?
Mhm ! Mhm!
– A’a ! Ndaa huunde faarti yam haa ɗoo. – Eh ! Il y a une chose qui m’a chassé jusqu’ici.
– Yaa, naastu suudu am jooɗa ! » – Viens rester chez moi[3] ! »
Yehi naasti suudu jooɗake. Il est allé rester [chez lui].
Too, ndeen, mm, mm, huunde ɗoo, Bon, alors, euh, euh, la chose,
tummude goo yottake : la calebasse est arrivée :
« – Hokkitam ɓinngel am. « – Rends-moi mon enfant !
– A’a, mi hokkitittaa. » – Non, je ne le rendrai pas ! »
Na’am ! Na’am !
Yoo, nyiiwa wari. Bon ! L’éléphant est arrivé.
« – Too, e ɗume waadi on ? « – Alors, que s’est-il passé entre vous ?
– A’’a, ndaa faayde[4] am mi faarti haa ɗoo, – A’’a, voici la chose que j’ai trouvée et que j’ai poursuivie jusqu’ici,
o salii hokkititgo yam. » il [porc-épic] refuse de me la rendre. »
Ɗum fiisti haɓre. Ils ont commencé à se battre.
Ɗum ɗon haɓa, Ils se battent,
ɗum ɗon haɓa, ils se battent.
Mhm ! Mhm !
Sey, ee, ee, nyiiwa goo yaaɓi tummude goo sampiti. Puis, euh, euh, l’éléphant a piétiné la calebasse qui a éclaté en morceaux.
Mhm ! Mhm !
« Ɓinngel ! War wurta ! » « L’enfant ! Viens, sors ! »
Ɓinngel haa wurtoo, L’enfant s’apprêtant à sortir,
laalaaje ngara takka ɓanndu. les morceaux de calebasse viennent se coller sur lui.
Mhm ! Mhm !
O nanngi laalaaje goo o sampiti. Il [l’éléphant] prend les morceaux de calebasse et les réduit en miettes.
Ooho ! Ooho !
Yoo, suy, takala mulus ! Bon, et c’est fini !
(Rires) (Rires)

Corpus inédit, © Copyright Henry Tourneux


Notes:

[1] Les lignes 16-19 n’ont pas de sens très précis, mais elles évoquent un rythme tambouriné. Dummbo désigne un genre musical où interviennent luth, calebasse et chant (Noye 1989, p. 90). Le verbe dummbugo signifie « exé­cuter une musique du genre dummbo ».

[2] La chanson n’a aucun sens à proprement parler, mais elle évoque un rythme de pilage. L’abondance des occlusives palatales [c] donne une impression acoustique de bruit « mouillé », qui reproduit iconiquement le bruit du pilage dans l’eau. Ensuite, la syllabe caŋ– évoque le nom du porc-épic lui-même : saŋalde, moyennant une alternance consonantique à l’initiale.

[3] Litt. : « Va ! Entre dans ma maison [et] reste ! »

[4] Litt. : « objet ou petit animal trouvé » (Noye 1989, p. 109) qui appartient à celui qui le trouve. Ici, il s’agit de l’enfant, qui est considéré comme un animal de brousse rencontré en route par hasard et dont on s’est emparé.