Piisaaɗe rewɓe / Les manières hypocrites des femmes

 

Mots-clés

peul, fulfulde de l’Aadamaawa (Cameroun et États voisins) — oralité, histoire, kiistawol — adultère, ruse, amant, courge

Production du corpus

Conteuse: Saoudatou Yougouda; environ 35 ans. Elle est née à Bogo. Divorcée, elle a des enfants. Elle vit seule dans sa maison. Son père est décédé.

Contexte de production

Wouro Issa (Bogo) 17/02/2012

L’histoire a été enregistrée dans une case, dans la matinée, suite à un rendez-vous pris avec la conteuse.

Descriptif

Un homme va en voyage. Sa femme a un amant. Le jour du retour de son mari, elle décide d’aller faucher de l’herbe derrière la maison; c’est aussi le chemin par où revient son époux. Le mari trouve sa femme en train de faucher de l’herbe. Le mari l’aide à faucher l’herbe. Le mari demande à sa femme de rapporter ses bagages à la maison. La femme remet les bagages de son mari à son amant. Le mari ramène la botte d’herbe. Sa femme l’accueille. Le mari demande ses bagages. La femme ne sait pas de quoi il parle, elle pleure. Elle dit que son mari n’a rien rapporté de son voyage à part une botte d’herbe. On attache l’homme.

La femme du roi est au courant de l’affaire. Elle s’impatiente. La femme du roi veut qu’on détache cet homme innocent. Le roi refuse. La femme du roi demande à un enfant de lui rapporter du fleuve des petits poissons avec du sable. Elle demande aussi une courge. Elle dit au roi qu’elle va préparer de la courge; le roi en veut. La femme du roi nettoie l’intérieur de la courge, y met les petits poissons et du sable et la referme. Elle fend la courge et s’étonne de ce qu’elle trouve dedans.

Le roi regarde cela et s’en va appeler ses courtisans. Quand le roi revient, la femme a déjà jeté la courge dans les latrines. Le roi revient avec ses courtisans, la femme dit ne pas savoir de quoi parle le roi. On attache le roi pendant une semaine.

La femme du roi prépare le bain du roi. Elle va trouver le roi et lui dit ce que l’hypocrisie de la femme peut faire. Le roi demande qu’on libère le jeune homme et qu’on attache sa femme à sa place. La femme crie, pleure et dit la vérité. On attrape l’amant et il ramène les bagages de l’homme. L’homme répudie la femme

Collecte et édition

Collecté sous la direction de: Hadidja Konaï

Image et son: Henry Tourneux

Transcription et traduction: Boubakary Abdoulaye et Henry Tourneux

Annotation: Henry Tourneux

 

 

 

 

 

 

Gorko dilli jahaangal, Un homme est parti en voyage,
Mhm ! Mhm !
ɗali debbo muuɗum ! et a laissé sa femme !
Nde o dilli jahaangal, o ɗali debbo maako. En partant en voyage, il a laissé sa femme.
Debbo maako goo boo, suka yiɗi ɗum. Sa femme, il y a un jeune homme qui l’aime.
Sukaajo yiɗi mo haa ɓuri semmbe. Le jeune homme l’aime extrêmement.
Mhm ! Mhm !
Yowwa, gorko maako dilli jahaangal. Bon, son mari est parti en voyage.
Nyannde wartata goo, Le jour de son retour,
Mhm ! Mhm !
suy o hoo’i feƴƴirde, elle a pris une hache,
a’’a, o hoo’i waarudu. non, elle a pris une faucille.
Mhm ! Mhm !
O wii o yahan o wa’oya, Elle dit qu’elle va aller faucher,
o yahan o wa’oya huɗo haa ɓaawo calaaje maɓɓe nii. qu’elle va aller faucher de l’herbe derrière chez eux.
Mhm ! Mhm !
Gal toon, gorko maako tokkortoo wartira. C’est par là que son mari passe pour rentrer.
Mhm ! Mhm !
Yowwa ! O yehi o ɗon wa’a huɗo goo, Bon ! Elle est allée faucher de l’herbe,
gorko ɗon roondii[1] donngal muuɗum, ɗon warta. l’homme porte des bagages, il revient.
Mhm ! Mhm !
Ii ! Woɗ-, goɗɗo noon boo ɗon roond-, Euh… Il y a euh… Quelqu’un d’autre… por-,
bambe boo ɗon roondanii ɗum. un porteur lui en porte [une partie].
Mhm ! Mhm !
Yowwa ! Suy gorko goo yaali mo, Bon ! Alors, le mari passa à côté d’elle,
wii mo : « E ko ngaɗtaa bee huɗo ɗoo ? » et lui dit : « Que fais-tu avec cette herbe ? »
O wii haa o yaha o waɗa haa ɓaawo-suudu maɓɓe ɗoo. Elle dit qu’elle va la mettre à leur toilette.
Mhm ! Mhm !
Ko dilli pat, ii, o ɗon jooɗii meere noon ! Depuis qu’il est parti, euh…, elle est restée comme ça sans rien[2] !
Jam, gorko goo wii mo yoo : « Ndeen kam, Puis, le mari lui dit : « Comme ça,
ndaa donngal am ɗoo, hooru saare. voici mes bagages, emporte-les à la maison.
Ndaa bee ngal bammbe roondii, Voici aussi ceux que transporte le porteur,
Mhm ! Mhm !
huucu aan kam, mi ɗon itta. » toi, rentre à la maison, je vais faucher[3]. »
Ɗoo kam gorko gartuɗo jahaangal jonta, Là, c’est le mari qui vient à l’instant de rentrer de voyage,
Mhm ! Mhm !
Alla anndi lebbi noy ! [il avait été absent] Dieu sait combien de mois !
Mhm ! Mhm !
Gorko jaɓi wa’i huɗo kam, waɗi waare muuɗum. L’homme a pris [la faucille] et a fauché l’herbe, il en a fait une botte.
Hiddee ko yottoo goo, Avant qu’il arrive,
suka goo boo wii mo yoo : le jeune homme [l’amant] dit [à la femme] :
« To a yiɗi yam kam, « Si tu m’aimes,
to gorko maa warti, quand ton mari sera revenu,
Mhm ! Mhm !
donngal mum ɗoo, ngaraa cakkiinaa ngal ɓaawo leeso am. » ses bagages, viens les jeter derrière mon lit. »
Mhm ! Mhm !
O jaɓi donngal e gorko. Elle a pris les bagages de son mari.
O yehi o sakkini ɓaawo leeso suka. Elle est allée les jeter derrière le lit du jeune homme.
Bee ngal bambe roondii fuu, De même que ceux que portait le porteur,
o yehi o sakkinoyi ɓaawo leeso suka. elle est allée les jeter derrière le lit du jeune homme.
Mhm ! Mhm !
Gorko warti bee huɗo, do’’i huɗo, jo’’ini. Le mari est revenu avec l’herbe, a jeté l’herbe par terre, et l’a posée.
Mhm ! Mhm !
O jaɓɓi ɗum, o hokki ɗum ndiyam, noy noy, yari, nyaami, timmini. Elle l’a accueilli[4], elle lui a donné de l’eau, et tout et tout, il a bu, il a mangé, il a tout fait.
Ɓe ɗon njooɗii ! Ils sont assis !
Suy, ɓe ɗon njooɗii goo, Puis, comme ils sont assis là,
gorko goo wii mo : le mari lui dit :
« Yaa waddanam donngal goo nee haa mi fiista. » « Apporte-moi mes bagages pour que je les défasse. »
O wii ɗum yoo : « – Donngal ngalee ? Elle lui dit : « – Quels bagages ?
– Hi, donngal ngalee ! » – Comment, quels bagages ! »
Ɓiira, o jooɗii o toɓɓi. Ɓiira, elle a poussé un cri :
« – Mi laari bone am ! « – Il m’est arrivé un malheur[5] !
Kay ! Ayyee ! Gorko am wartidaay ! Eh ! Mon Dieu ! Mon mari a perdu la tête[6] !
Mi laari bone am ! Il m’est arrivé un malheur !
Gorko am wartidaay ! Mon mari a perdu la tête !
(Rire) (Rire)
– Ko habar ? » – Que se passe-t-il ? »
Mhm ! Mhm !
He ! Ɓiira, yimɓe mooɓti. Eh ! Ɓiira, des gens se sont rassemblés.
« – Cenndee yam bee maako ! « – Séparez-moi de lui !
Keedee hakkunde amin ! Interposez-vous entre nous !
Keedee hakkunde amin ! Interposez-vous entre nous !
Wayyam hey, mi natti ! Ô mon Dieu ! Je suis fichue !
– Ee ko habar ? – Que se passe-t-il ? » [demande une autre personne encore].
– O wii sike… o warti jonta ɗoo o nyaami o timmini. Il dit… il vient de revenir, il a mangé, et tout et tout,
O wii, donngal… il dit que ses bagages…
Mi yidaay mo boo bee donngal. Je ne l’ai pas vu avec des bagages.
Huɗo kokkoon, ndaa huɗo o roondii o wartidi. Cette herbe-là, voilà l’herbe qu’il portait et qu’il a rapportée.
(Rire) (Rire)
Mhm ! Mhm ! Mhm ! Mhm !
Huɗo, huɗo kokkoon ! L’herbe, cette herbe-là !
Wayyoo ! Alla am ! Mi laari … » Hélas ! Mon Dieu ! Il m’est arrivé … »
Ɓiira, gorko kam, Ɓiira, le mari…
ɓe teeŋi[7] ɗum ɓoggi haa baaji lutti. on l’attacha fortement avec suffisamment de cordes[8].
Ɓe ɗon kaɓɓi gorko. On attacha l’homme.
Gorko kam ɗon… ɗon wolwa noon, L’homme est en train de parler,
wii : « – Kaay ! Ayyee !… et il dit : « – Qu’est-ce que vous faites ! Ce n’est pas possible !…
– Nanee lee ! Ko o wolwata, nanee ! – Écoutez-le donc ! Écoutez ce qu’il raconte !
Kaa kam pat, ɗum haala meere. Tout ça, c’est des histoires.
Nanee ko o wolwata ! » Écoutez ce qu’il dit ! »
Ɓe ɗon kaɓɓi gorko. On attacha l’homme.
Ɓiira, debbo laamɗo nanoyi ka. Ɓiira, la femme du chef apprit la chose.
Ka naawi ɗum. Ça lui fit mal.
Mhm ! Mhm !
Ɓiira, a anndi haala kam yottotoo haa laamɗo, Ɓiira, tu sais que cette affaire va arriver aux oreilles du chef,
iraada haala bannii kam ! un genre d’histoire comme ça[9] !
Mhm ! Mhm ! Mhm ! Mhm !
Ɓiira, debbo laamɗo, ka naawi ɗum. Ɓiira, la femme du chef, ça lui a fait mal.
Debbo laamɗo goo wii laamɗo yoo : La femme du chef dit au chef :
« Jonta kuugal ngaal ɗoo ɗoo nii, « Maintenant, ce genre d’histoire…
on ɗon… a ɗon hiitoo haa wuro ɗoo, vous… que tu juges dans ce village,
a anndi haa wuro ɗoo nii, tu sais que dans ce village,
a anndi rewɓe bee faasikaare, tu sais qu’elles sont fourbes,
njaɓaa haala kaa, et tu accepterais ça,
ɓe kaɓɓa ɓinngel gorko ɗoo, ba mardi hakkiilo nii ɗoo ɗoo ? qu’on attache ce garçon alors qu’il est si intelligent ?
Mhm ! Mhm !
Yimɓe pat, ka naawi ɗum, ciŋki ka ! C’est à tout le monde que cette affaire fait mal, [tous] s’en plaignent !
A faami ? » Tu comprends ? »
Asee, haa o heɓa o naatra suka. En fait, elle cherche à trouver le moyen d’épouser le jeune homme[10] !
Jam, booɗɗum walaa ayibe ! Bon, bien ! Il n’y a pas de problème !
Debbo laamɗo ɗoo walaa ko haɓdaay haa ɓe piista gorko ɗoo, La femme du chef, elle a tout fait pour qu’on détache le mari,
laamɗo salii. le chef a refusé.
Ɓinngel goo, ɓinngel ɗon nder saare laamɗo ɗoon. Un enfant, il y a un enfant chez le chef.
O wii : « – Yaa waddanam liikon cewkon cewkon haa maayo ! Elle [la femme du chef] dit [à cet enfant] : « – Va me chercher du menu fretin au fleuve !
Mhm ! Mhm !
Ngaddanaa yam bee njaareendi ! Apporte-le-moi avec du sable !
Mhm ! Mhm !
– Wooɗi, walaa ayibe ! » – Bien, sans problème ! »
Ɓinngel gorgel goo, ɓiira, yehi ittoyi liikon cewkon cewkon nii haa maayo, Le jeune garçon en question, ɓiira, est allé pêcher du menu fretin dans le fleuve,
waddi bee njaareendi. il l’a apporté avec du sable.
O wii mo yoo : « Ɗaɓɓanam waygoore ! » Elle lui dit : « Va me chercher une courge ! »
Mhm ! Mhm !
O ɗaɓɓi waygoore. Il est allé chercher une courge.
Ɓiira, o heeri, o hee-… Ɓiira, elle a délimité[11], elle a dé-
A’’a ! O wii laamɗo yoo : Non[12] !… Elle a dit au chef :
« – Miin kam, hannde kam, sey mi defana’en waygoore ! « – Moi, aujourd’hui, il faut que je nous cuise de la courge !
– Ayyee ? Aa ? A defanan’en waygoore ? – Ah bon ? Hein ? Tu vas nous cuire de la courge ?
Aa ! Na booɗɗum ! Oui, c’est bien !
Ndeen kam, waɗanan’en laawturu. En ce cas, fais-nous de la pâte de courge !
(Rire) (Rire)
– Booɗɗum ! » – D’accord ! »
Jam, o ɗon jooɗii goo, Puis, après s’être assise,
jam, ɓiira, o seeki, alors, ɓiira, elle a fendu [la courge],
jam, o hooƴi liikon goo o yoll-, puis, elle a pris les petits poissons et les a four-…,
o heertindii waygoore goo. elle a tracé un rond sur la courge.
Mhm ! Mhm !
O yolli liikon goo bee njaareendi nder waygoore goo. Elle a fourré les petits poissons et le sable dans la courge.
Mhm ! Mhm !
Suy, o maɓɓi, o sukki. Puis, elle a refermé [le trou], elle l’a bouché.
Mhm ! Mhm !
Suy, ɓiira, o ɗon jooɗii noon, o seeki waygoore nii goo, Puis, ɓiira, elle est assise, elle a coupé la courge,
jam, ɓiira : « Hii ! puis, ɓiira, [elle s’exclame] : « Oh là là !
Njoowɗee[13] ƴoownanee yam laamɗo ! Appelez-moi vite le chef !
E ɗum ɗume ɗuum boo ! » Qu’est-ce que c’est que ce truc-là ! »
Ɓiira, laamɗo, ɓiira, ngurtoyɗaa ! Ɓiira, le chef, ɓiira, tu es sorti[14] !
« Aan, a giiɗo ko tawmi nder waygoore ndee na ? » « Toi, as-tu vu ce que j’ai trouvé dans cette courge ? »
Laamɗo wii mo : « Dara haa mi ƴoownoyoo saraaki’en haa yaasi. » Le chef lui dit : « Attends que j’appelle mes notables dehors ! »
Laamɗo, waylitaago noon, Le chef, dès qu’il s’est retourné,
o yehi o yolloyi nde nder calka. elle est allée jeter [la courge] dans les latrines.
Ɓiira, saraaki’en toɓi bee laamɗo. Ɓiira, les notables arrivèrent brusquement avec le chef.
« Ee toy ɗuma goo ? » « Et où est ce truc ? »
O wii : « – Ɗum ɗumeejum ? Elle dit : « – Quel truc ?
(Rire) (Rire)
– Ɗum ɗume ? » – [Tu me demandes] quel truc ? »
Mhm ! Mhm !
O wii : « Jonta ceekɗaa waygoore ! Il dit : « A l’instant, tu as fendu une courge ! »
Ɓiira, ii…, debbo laamɗo, ɓiira, yooyti. Ɓiira, euh… la femme du chef, ɓiira, poussa des lamentations.
(Rire) (Rire)
« Kay ! Wayyam hey, Alla am ! « Kay ! Hélas, mon Dieu !
Ee ko waɗanimmi laamɗo ? Qu’est-ce qu’on a pu faire à mon chef ?
Waygoore ndeen mi seeka nde, liɗɗi ngurtoo bee njaareendi ? Cette courge, je la fends, et il en sort des petits poissons avec du sable ?
Innaa lillaahi ! Wayyam hey, Alla am ! Mi laari bone ! » Innaa lillaahi, hélas, mon Dieu, un malheur m’est arrivé ! »
[Ɓe kaɓɓan laamɗo kam ?] [Ils vont attacher le chef[15] ?]
Hala ! Laamɗo, ɓe tirzi ɗum haa baaji lutti ! Et comment ! Le chef, ils l’ont ficelé bien proprement !
(Rire) (Rire)
Ɓe njehi ɓe kaɓɓoyi ɗum. On est allé l’attacher.
Ɓe njehi ɓe naastini ɗum nder… nder suudu. On est allé l’enfermer dans… dans la maison.
Asaweere, laamɗo ɗon haɓɓi haa baaji lutti. Pendant une semaine, le chef reste bien ficelé.
Gorko, debbo goo dolli ngulɗam. Le mari[16]… La femme [du chef] a fait bouillir de l’eau.
O, o yaari ɓaawo suudu, Elle… elle l’a emportée à la toilette
bee sooso bee saabul pat, o yaari ɓaawo suudu. en même temps qu’une éponge végétale et du savon, elle les a emportés à la toilette.
O wurtinoyi lumce laamɗo paasaaɗe, o jo’’ini. Elle a sorti les habits repassés du chef et elle les a déposés.
O yehi haa suudu goo, o maɓɓiti laamɗo. Elle est allée à la maison et a libéré le chef.
O wii mo : « Mi haɓɓaay ma na ? » Elle lui dit : « Ne t’ai-je pas attaché ? »
Mhm ! Mhm !
O wii mo : « Mi haɓɓi ma. » Il lui dit : « Je t’ai attachée[17]. »
O wii : « Na a giiɗo piisaaɗe rewɓe ! Elle dit : « Tu as bien vu l’hypocrisie des femmes !
Mi haɓɓaay ma na ? » Je ne t’ai pas attaché ? »
O wii : « Mi haɓɓi ma ! Il dit : « Je t’ai attaché !
(A haɓɓi yam !) (Tu m’as attaché[18] !)
Ee ! a haɓɓi. » Oui ! Tu [m’]as attaché. »
O fiisti laamɗo goo. Elle détacha le chef.
Laamɗo yehi yiiwii, laaɓi tal. Le chef est allé se laver, très propre.
O ƴeewnii saraakiijo laamɗo, [La femme] a appelé le notable du chef,
Mhm ! Mhm !
o wii : « Ngurtinee korowal ! » elle lui a dit : « Sortez une chaise ! »
Ɓe ngurtini korowal. Ils sortirent une chaise.
O hokki ɗum[19] laamɗo lumce, ɓorni. Elle donna des habits au chef et il les mit.
« Yaa jooɗaa dow korowal ! » « Va t’asseoir sur la chaise ! »
Laamɗo yehi jooɗii. Le chef alla s’asseoir.
O wii : « Ɓiɗɗo gorko mo kaɓɓuɗon ɗoo, Il dit : « Le garçon que vous avez attaché,
law, njoofon mo, kaɓɓon debbo ! » vite, libérez-le, attachez la femme ! »
Mhm ! Mhm !
Laamɗo ɗon jooɗii goo wii : « Law, Le chef qui était assis dit : « Vite,
Njehee ngaddee debbo kaɓɓuɗo gorko mum ɗoo. Allez chercher la femme qui a attaché son mari !
Mhm ! Mhm !
Piistee gorko, kaɓɓee debbo ! » Détachez l’homme, attachez la femme ! »
Ɓe piisti gorko, ɓe kaɓɓi debbo. Ils détachèrent l’homme et attachèrent la femme.
A ɗon faama ? Tu comprends[20] ?
Mhm ! Mhm !
Ɓiira ɓe ngari. Ɓiira, ils y sont allés.
Ɓiira, debbo kam, ɓe tirzi ɗum kam, ɗon wooka, ɗon wooka : Ɓiira, la femme, ils la ficelèrent, elle crie, elle crie :
« Wayyoo ! Mi laari bone am ! « Aïe aïe aïe ! Un malheur m’est arrivé !
Wayyoo ! Mi laari bone am ! Aïe aïe aïe ! Un malheur m’est arrivé !
Ɗum suka, suka wurtinimmi. C’est le jeune homme, le jeune homme m’a fait sortir.
Wallaahi suka wii yoo Je le jure ! Le jeune homme [m’]a dit :
sey mi wadda ii… il faut que j’apporte, euh…
(donngal) (les bagages[21])
donngal, donngal am haa ɓaawo leeso maako. les bagages, mes bagages derrière son lit.
Donngal gorko am, Les bagages de mon mari,
mi wadda ɗum haa ɓaawo leeso maako. que je les emporte derrière son lit.
O wii to mi, to mi yiɗi mo kam, Il a dit que si je, si je l’aime,
noon, sey noon. » comme ça, il faut [que je fasse] comme ça. »
Jam, ninnoon, ii, ɓe mbii mo yoo : « Joota booɗɗum ! » Puis, comme ça, euh… on lui dit : « Réfléchis[22] bien ! »
O jootii ! Elle a bien réfléchi !
O wii mo yoo : « Law ! [Le chef] lui a dit : « Vite !
Njahaa koocoyaa donngal gorko maaɗa ɗoo, Vite, va chercher les bagages de ton mari,
Mhm ! Mhm !
koo peetitel nii, taa ustoo ! sans y enlever la plus petite chose !
Yaa wurtinoyi ngal. » Va les sortir ! »
Jam, ɓe ngaddoyi suka. Puis ils firent venir le jeune homme.
Suka, ɓe mbii mo yoo : « E ko ngaaruɗaa[23] ka ? » Le jeune homme, ils lui dirent : « Et pourquoi as-tu fait ça ? »
O wii : « – Hii, na mi yiɗi mo ! Il dit : « – Hein ! C’est que je l’aime !
– E a yiɗi mo kam, – Et si tu l’aimes,
sey ngaɗaa bannii na ? » c’est comme ça que tu dois faire ? »
O wii : « – Hii, na mi yiɗi mo. Il dit : « – Oui ! C’est que je l’aime !
– Too, ndeen kam, yaa waddu kuuje gorko ɗoo. – Bon ! En ce cas, va chercher les affaires du mari !
Mhm ! Mhm !
Ko halki pat, a yoɓan. » Tout ce qui est perdu, tu le rembourseras. »
Jam, o yehi o waddoyi donngal gorko goo kam, Puis, il alla chercher les bagages du mari,
koo fiistaago ma, ngal fiistaaki. ils n’avaient même pas été déballés[24].
Ɓe njehi ɓe ngartirani gorko. Ils allèrent les rapporter au mari.
Jam, gorko goo wii : « Miin boo, mi yiɗaa mo sam ! Puis, le mari dit : « Quant à moi, je ne l’aime plus du tout !
Mi yiɗaa mo. Je n’en veux plus.
Mi seeri, mi yiɗaa mo. » Je [la] répudie, je ne l’aime plus. »
Nii, jam, o dilli. Ainsi, donc, elle est partie.
Takala mulus ! Takala mulus !

Corpus inédit, © Copyright Henry Tourneux

 


 

Notes:

[1] Roondaago : « porter sur la tête ».

[2]. La conteuse veut dire que la toilette étant restée sans clôture, par conséquent, la femme était exposée à la vue des passants quand elle s’y rendait.

[3] Litt. : « je vais enlever ».

[4] L’épouse fait tout ce qu’une bonne épouse fait lorsque son mari rentre de voyage : elle le salue, lui apporte de l’eau à boire et de la nourriture.

[5] Litt. : « J’ai vu mon malheur ! »

[6] Litt. : « Mon mari n’est pas revenu avec ».

[7] Noye 1989 donne la forme teŋ-, mais la conteuse utilise bien un radical teeŋ-.

[8] Litt. : « on l’attacha avec des cordes, jusqu’à ce qu’il restât des bandes d’écorce ».

[9] Incise de la conteuse qui prévoit déjà ce qui va se passer.

[10] Incise de la conteuse qui explique les intentions réelles de la femme qui veut faire passer son mari pour fou.

[11] La femme du chef, avec un couteau, effectue une petite ouverture dans la courge, qu’elle rebouche après y avoir introduit ce qu’elle veut. Dans les lignes qui suivent, on comprend que cette ouverture est circulaire.

[12] La conteuse se rend compte qu’elle est en train de sauter une étape, et elle se reprend.

[13]. Le radical verbal utilisé ici est yaaw-, sous la variante yoow-.

[14] Incise de la conteuse qui interpelle le personnage du chef.

[15] Question d’une femme de l’auditoire qui imagine déjà ce qui va arriver au chef.

[16] Lapsus de la conteuse.

[17] Erreur de la conteuse qui voulait dire : « Tu m’as attaché ».

[18] Une femme de l’auditoire corrige la conteuse.

[19] Pronom inutile, prononcé par erreur par la conteuse.

[20] La conteuse interpelle la personne de l’auditoire qui se trouve en face d’elle.

[21] Une personne de l’assistance souffle un mot à la conteuse qui a une hésitation.

[22] Litt. : « Reconsidère bien [ce que tu as dit] ! Du verbe jooɗtaago [jootaago], dérivé de jooɗaago « s’asseoir ».

[23] Forme structurelle : *waɗru-. Avec l’alternance consonantique à l’initiale entraînée par la suffixation du sujet, cela donne ngaɗru-ɗaa. Le groupe [ɗr] donne d’abord [’r], nga’ruɗaa > ngaaruɗaa.

[24] Litt. : « Même être déballés ils n’ont pas été déballés ».