Merveilleux

 

Comme pour le fantastique, le merveilleux, dans son acception interculturelle d’origine occidentale, est une qualité que l’on prête à des énoncés faisant intervenir des événements invraisemblables du point de vue de l’expérience positive et relevant du « surnaturel » et du « magique ». C’est ainsi que, dans leur classification du conte populaire oral à prétention universelle, Aarne et Thompson ont introduit une catégorie « conte merveilleux », catégorie reprise plus tard par Propp pour proposer sa « morphologie » du conte. Mais à la différence de la littérature fantastique, la littérature merveilleuse propose un pacte de lecture selon lequel est tenue pour acquis l’existence d’un monde surnaturel agissant et clairement visible. Elle projette donc le lecteur ou l’auditeur dans un autre univers, imaginaire, sous forme d’une invitation au rêve et à la fantaisie. Cette propriété du texte n’a donc plus rien d’étrange ni d’angoissant et est plutôt destinée à « l’émerveillement », terme qui est précisément fondé sur la même racine.

Le mot français merveilleux a pu s’appliquer dans l’histoire littéraire aussi bien à propos du conte (contes de fée comme on dit encore) que de l’épopée (à propos de laquelle il s’agit d’une catégorie souvent mise en évidence par la doxa critique), du théâtre (Le songe d’une nuit d’été et autres fééries), voire du roman (du roman de chevalerie aux fantaisies modernes).

Pour les mêmes raisons que celles avancées à propos du fantastique, en Afrique, dans la mesure où les phénomènes supra-sensibles ne sont plus vraiment considérés comme « sur-naturels » et « extra-ordinaires », le concept de merveilleux n’a plus guère lieu d’être, excepté peut-être sous la forme hyperbolique qu’il prend parfois dans l’épopée et qui peut encore susciter un certain « émerveillement ». Il devra donc être utilisé avec la plus grande précaution.

Jean Derive